LORS DE SON VOYAGE AU ZIMBABWE, CHRISTOPH HOFER (À DROITE) REND ÉGALEMENT VISITE AU PIONNIER SUISSE DU SIDA RUEDI LÜTHY (À GAUCHE) ET À SA CLINIQUE DU SIDA À HARARE.
(L'interview a été initialement publiée dans Blog de l'hôpital municipal Triemli)
Le professeur Christoph Hofer, médecin-chef du centre périopératoire ambulatoire (APZ) de l'hôpital municipal Triemli, s'est rendu au Zimbabwe pour avoir un aperçu de la prise en charge médicale de la population. Il a notamment rencontré le professeur Ruedi Lüthy à Harare, la capitale du Zimbabwe. Pionnier suisse du traitement du sida, le professeur Lüthy a mis sur pied sur place une grande clinique de traitement du sida qui connaît un grand succès.
Monsieur le professeur Hofer, quelle est l'idée de base de votre voyage au Zimbabwe ?
L'objectif du voyage était d'accompagner la délégation de World Vision Suisse dans le suivi des projets de développement financés par des donateurs suisses. Il me tenait personnellement à cœur de me faire une idée des soins de santé sur place.

CLINIQUE DE FUMUGWE : CHRISTOPH HOFER, L'INFIRMIÈRE ODREY PONDWA, LE MÉDECIN DE DISTRICT DR. MATHEW MTHUNZI ET DAVID SCHWITTER, RESPONSABLE PAYS WORLD VISIONS POUR LE ZIMBABWE.
Pourquoi avez-vous choisi le Zimbabwe ?
Le Zimbabwe est l'un des pays africains les plus pauvres. La faim, la pauvreté et le chômage sont très répandus, surtout dans les zones rurales à peine desservies.
Comment en est-on arrivé là ?
Plusieurs raisons expliquent l'évolution dramatique de ce pays autrefois prospère et en plein essor : D'une part, depuis son indépendance il y a plus de 30 ans, le Zimbabwe est tombé dans une grande pauvreté en raison de la mauvaise gestion et du népotisme d'un gouvernement corrompu et incompétent. D'autre part, le Zimbabwe avait fortement souffert d'une épidémie de SIDA dévastatrice dans les années 90, dont les effets se font encore sentir aujourd'hui.
Qu'avez-vous vécu lors de votre voyage ?
Le voyage m'a conduit dans l'ouest du pays, un peu au sud de Bulawayo. Là-bas, World Vision Suisse soutient financièrement quatre projets visant à promouvoir les soins de santé de la population locale et à mettre en place des cliniques. Au Zimbabwe, le terme "clinique" dans les régions rurales n'a pas la même signification que celle à laquelle nous sommes habitués en Europe. Ces cliniques sont des stations médicales qui permettent d'atteindre un certain niveau d'hygiène. Les cliniques doivent être accessibles dans un délai raisonnable, ce qui peut signifier jusqu'à deux heures de marche.
NEWLANDS CLINIC À HARARE : LE DIRECTEUR DE LA CLINIQUE, MATTHIAS WIDMAIER, S'ENTRETIENT AVEC CHRISTOPH HOFER ET DAVID SCHWITTER (DE G. À DR.)
Quelles sont les mesures de lutte contre le VIH/sida actuellement mises en place au Zimbabwe ?
Dans le cadre de mon voyage, j'ai eu l'occasion de visiter la Newlands Clinic à Harare. Cette clinique spécialisée pour les malades du SIDA a été fondée en 2003 par un médecin suisse, le professeur Ruedi Lüthy. Spécialiste reconnu du VIH/sida, il connaît parfaitement la maladie et ses effets sur les personnes touchées. En Suisse, il a été cofondateur de l'hospice Lighthouse de Zurich et a ensuite créé en 2003 la Ruedi Lüthy Foundation, qui est l'organisme responsable de la Newlands Clinic au Zimbabwe.
Quelles sont les tâches de la Newlands Clinic ?
En premier lieu, il y a les soins directs aux patients. Aujourd'hui, la clinique fournit gratuitement à plus de 6300 patients démunis les médicaments nécessaires au traitement de leur maladie. Mais les personnes concernées ont aussi et surtout besoin d'un soutien socio-psychologique pour pouvoir s'en sortir dans la vie. Cela concerne en particulier les jeunes adultes de moins de 24 ans, qui représentent actuellement plus d'un quart de tous les patients. En outre, la clinique offre aux personnes concernées le soutien nécessaire en matière de nutrition et de soins dentaires ainsi que de dépistage de différentes maladies.
Outre les soins aux patients, la clinique forme depuis quelques années des médecins et des infirmiers à la gestion du VIH. Les participants ne viennent plus seulement du Zimbabwe, mais aussi des pays voisins comme le Botswana, la Zambie et le Mozambique.
Quels sont les résultats obtenus jusqu'à présent par la Newlands Clinic ?
Il y a 20 ans, le taux de VIH/sida au Zimbabwe était encore d'environ 27%. Une personne sur quatre âgée de 14 à 50 ans était séropositive. Aujourd'hui encore, avec près de 1,3 million de personnes infectées - dont de nombreux jeunes et un nombre disproportionné de femmes - le Zimbabwe se situe en haut de la liste des pays présentant les taux de VIH/sida les plus élevés au monde.
La Newlands Clinic a enregistré des succès importants dans ce domaine. Grâce à la distribution gratuite de médicaments modernes, 90% des 6300 patients actuels ne sont plus porteurs du VIH. Comme la clinique ne cesse de s'agrandir et que le nombre de personnes suivies ne cesse d'augmenter, on peut s'attendre à ce que de bons résultats continuent d'être enregistrés à l'avenir. Pour y parvenir, la Newlands Clinic a toutefois besoin d'un soutien financier.

LA "SALLE D'ATTENTE" DEVANT UN CENTRE DE SANTÉ FINANCÉ PAR WORLD VISION SUISSES WORLD VISION À FUMUGWE, DANS L'OUEST DU ZIMBABWE
Quelles sont les futures étapes des projets dans les zones rurales ?
On peut certainement qualifier ces projets de durables. Bien que beaucoup de choses aient déjà été réalisées, cela ne doit pas faire oublier que ces cliniques ne fournissent qu'un minimum de soins médicaux. Le matériel médical continue de faire défaut.
Du côté de la population, les choses sont claires. Elle a reconnu la possibilité de construire quelque chose de sa propre initiative et le fait avec beaucoup de zèle et un enthousiasme inimaginable. De notre côté, nous pouvons tous contribuer, même avec de petits dons, à ce que ces projets relativement petits, mais aussi grands - comme la Newlands Clinic - puissent être développés avec succès. Les habitants chaleureux de ces régions du monde, qui vivent dans une pauvreté incroyable, méritent eux aussi de pouvoir envisager l'avenir avec espoir et confiance.
Soutenez les projets de développement de World Vision au Zimbabwe, par exemple en parrainant un village ou un enfant.