Pennha*, 25 ans, originaire du Cambodge, voulait juste un meilleur emploi et s'est retrouvée quelques jours plus tard dans les rues de Malaisie, entre les griffes de trafiquants d'êtres humains.
C'est une parente éloignée qui a piégé Pannha avec une offre d'emploi. Bien qu'elle soit consciente du danger que peut représenter la traite des êtres humains, la jeune mère de Battanbang avait trois bonnes raisons d'accepter l'offre : "Premièrement, je suis pauvre. J'ai pensé que ce serait bien d'avoir un travail. Deuxièmement, ils m'ont promis un passeport, ainsi je ne voyagerais pas illégalement. Et troisièmement, c'était une parente qui ne me trahirait certainement pas".
Trompée et déportée
Un jour, Pannha a été convoquée à Phnom Penh, soi-disant pour lui délivrer un passeport. Mais elle n'a reçu aucun document officiel, seulement un bout de papier plié sur lequel étaient collées sa photo et celle de son enfant. « Je savais que nos passeports étaient rouges. Celui qu'ils m'ont donné était blanc, ce qui m'a étonnée. Mais il n'y avait personne des autorités à qui je pouvais poser la question », se souvient la jeune femme. Le lendemain matin à neuf heures, Pannha a quitté la capitale avec son enfant, accompagnée d'une femme qui avait elle-même deux jeunes enfants. « Peut-être que ces bébés ne lui appartenaient pas, mais en tout cas, elle les a fait passer clandestinement en Malaisie », raconte-t-elle. «Nous avons passé la nuit à la frontière thaïlandaise, puis nous avons continué vers Bangkok. Là, nous avons poursuivi notre voyage avec une autre femme. Une fois arrivés à Kuala Lumpur, nous avons été remis à un homme et séparés du reste du groupe. » Il leur a fallu encore huit heures avant d'arriver à destination. Dans le cas de Pannha, six trafiquants d'êtres humains ont été impliqués dans l'enlèvement, deux au Cambodge et quatre en Malaisie.
Esclavage moderne
Dès le premier jour de son arrivée, elle a été emmenée au marché avec un parapluie, un sac et un bol en métal, où on lui a demandé de mendier. « Je ne voulais pas mendier et j'étais choquée. Ma parente m'avait promis un emploi de couturière. Mais quand j'ai refusé, ils m'ont forcée à payer les frais aux marchands qui m'avaient achetée », raconte Pannha. À partir de là, elle a été déposée tous les jours tôt le matin au marché et n'a été récupérée qu'à minuit. Chaque jour, elle et son bébé travaillaient plus de 10 heures et gagnaient entre 60 et 300 dollars américains, mais elle n'avait pas le droit de garder une seule centime. Sous prétexte que ses gains couvraient uniquement les frais d'hébergement et de nourriture, les marchands lui prenaient tout. Si elle gagnait moins que prévu, elle était menacée. « Parfois, ils pensaient que je cachais de l'argent quelque part sur mon corps, alors je devais parfois me déshabiller complètement devant eux », raconte-t-elle, bouleversée.
Enfin en prison
Dans cette situation délicate, Pannha priait pour que la police l'arrête enfin, mais rien ne se passait. « Je m'étonnais qu'ils passent si souvent devant moi sans rien faire. Ils me posaient simplement des questions et je leur répondais que je voulais retourner au Cambodge. » Mais un jour, le moment est venu : elle a finalement été arrêtée, tout comme ses trafiquants. « À ce jour, je ne sais toujours pas pourquoi ils ont relâché mes cinq bourreaux au bout d'une semaine et m'ont laissée, moi et mon bébé, en prison pendant quatre mois. Probablement parce que nous n'avions pas d'argent pour soudoyer la police », raconte Pannha, pensive. Mais elle en est certaine : « Si je n'avais pas fini en prison, j'aurais passé le reste de ma vie comme esclave. »
Lorsqu'elle a été autorisée à passer un coup de fil, elle a appelé sa mère au Cambodge et lui a décrit sa situation désespérée. Bien que sa mère ait demandé de l'aide au chef du village, rien ne s'est passé, car celui-ci était apparemment également impliqué dans l'affaire et a ignoré la situation. Après presque cinq mois de prison, elle a reçu une visite qui lui a redonné espoir : « Un jour, un homme est venu me voir et m'a demandé comment et pourquoi j'étais arrivée en Malaisie. Je lui ai répondu que j'avais été trompée lors de ma recherche d'emploi et que je voulais juste rentrer chez moi. »
Sauvetage et nouvelle vie
Un mois après cette rencontre, des collaborateurs d'une organisation de lutte contre la traite des êtres humains lui ont acheté un billet d'avion pour retourner au Cambodge. Grâce au projet « End Trafficking in Person » de World Vision , Pannha World Vision d'une aide psychologique et d'un soutien supplémentaire. « Outre les mesures thérapeutiques, les survivants de la traite des êtres humains bénéficient ici d'une aide fondamentale, telle que de la nourriture, des outils de travail et des formations pour gagner leur vie. Cela leur évite de devoir émigrer à l'étranger par manque de travail », explique Sammang Long, responsable du projet. Tout en cueillant quelques fruits de son arbre, Pannha raconte : « Je ne retournerai pas en Malaisie. Je veux profiter de la vie ici, dans mon village, où je cultive désormais des choux, des mangues, des noix de coco et des oranges
.
»
Depuis octobre 2016, 90 anciennes victimes de la traite des êtres humains et 1 320 enfants et adolescents ont bénéficié du projet "End Trafficking in Person" de World Vision . L'objectif du projet est d'améliorer le bien-être des survivants de la traite des êtres humains ainsi que des personnes vulnérables.
*Nom modifié par la rédaction.
